Bien tapis malgré eux à l’ombre des Beatles, Rolling Stones ou encore Elvis Presley, de nombreux musiciens et compositeurs n’ont pas eu la chance de percer comme ils auraient dû le faire. Coup du hasard ou poisse légendaire, leurs talents ont longtemps été dissimulés au grand public soit par paresse intellectuelle des grands médias spécialisés dans la musique ou simplement par mauvaise volonté de se mettre en avant eux-même. Voici quelques artistes qui méritent enfin d’être mis en lumière, le temps d’une lecture et d’une écoute attentive.
Du jeune Basil Kirchin propret, batteur précoce, sillonnant les clubs britanniques d’abord avec son père Ivor, puis avec d’autres big bands jazz au Basil Kirchin cheveux hirsutes et barbe broussailleuse, cloîtré dans son studio de la petite ville de Hull en Angleterre tapissé de bandes magnétiques et de synthétiseurs quelques années plus tard, le mystère reste entier quant à cette métamorphose déconcertante. Serait-ce son séjour de cinq mois (dix ans avant la horde des hippies pop, Beatles en tête) parmi les moines du Temple de Ramakrishna sur les bords du Gange durant l’année 1957 ? Ou alors la perte désolante et définitive de tous ses enregistrements, toute sa vie, gisant au fin fond du port de Sydney suite à une malencontreuse manipulation la même année ? Nul ne le saura. Ce qui est sûr, son profond sentiment de se sentir prisonnier du rythme, sa volonté irrévocable de briser ces chaînes invisibles et sa quête spirituelle intérieure façonneront la suite de sa carrière, non plus de batteur de jazz, mais de compositeur à part entière. De retour chez ses parents Ivor et Kay en 1961, Basil Kirchin se passionnera alors pour les techniques d’enregistrements avant-gardistes et la composition de films imaginaires qui serviront à illustrer des nombreux documentaires et d’émissions de télévision, comme Mind On The Run en 1967 ou Worlds Within Worlds en 1971.
Le Japon est-il l’autre pays du surf ? Définitivement oui avec l’immense guitariste Takeshi Terauchi né en 1939 et décédé l’année dernière. Au début des années soixante, l’Eleki est en plein boom. Et ceci grâce à l’influence énorme des Ventures, de leur rock’n’roll instrumental et surtout de leur immense tube, Apache. Les guitares Mosrite noires de ces américains happent très vite le regard du jeune Takeshi qui fonde son premier groupe en 1962 avec les Blue Jeans puis The Bunnys quatre ans plus tard. Dès lors, sa guitare Mosrite ne le quittera plus jusqu’à sa mort. Takeshi Terauchi est rapidement surnommé le roi de la guitare électrique grâce à son style particulier fait de picking, vibratos et trémolos en tous genres. La bonne formule trouvée, Takeshi Terauchi n’aura de cesse d’adapter tout ce qu’il entend à la sauce surf Eleki : chansons traditionnelles japonaises bien sûr mais également ballades romantiques, classiques populaires européens mais également chansons de noël. L’influence de Takeshi Terauchi sera phénoménale sur la musique japonaise des années soixante. Et elle perdure encore de nos jours sur des groupes comme Teke Teke qui prolonge l’héritage du roi de la Mosrite noire.
Surnommé le Godfather du rap avec son style particulier “parlé/chanté” qu’il utilise dès les années cinquante, notamment sur un de ses tubes Bacon Fat en 1957, Andre Williams est également durant ces années une des éminences grises du label Motown en collaborant avec de nombreuses futurs stars comme The Contours, The Temptations ou encore un Stevie Wonder encore juvénile. Son caractère difficile et son attirance vers les substances illicites auront raison de lui à partir du milieu des années soixante-dix puisqu’il disparaît de la circulation jusqu’à devenir quasi clochard pour ressurgir des limbes de la rue au milieu des années quatre-vingt-dix. L’album Silky publié en 1996 le fera revenir sur le devant de la scène dans le milieu garage rock’n’roll et le chanteur, surnommé Mr Rythm, devient le grand-père lubrique de toute une génération de rockers, des Dirtbombs à Jon Spencer Blues Explosion. Andre Williams est décédé d’un cancer du côlon en 2018.
Huit albums enregistrés entre 1975 et 1985 et puis plus rien. Le musicien nigérian William Onyeabor est une énigme que même le label de David Byrne, Luaka Bop, n’a pu percer en vue de compiler les morceaux du compositeur nigérian dans l’album Who Is William Onyeabor ?. Décédé en 2017, William Onyeabor n’a jamais voulu leur livrer son lourd secret autour de sa disparition et de sa nouvelle vie de chef de village dévoué à Dieu dans la région d’Enugu dans le sud du Nigéria. On a dit de lui qu’il fut étudiant en cinéma à Moscou ou encore étudiant en droit à Londres mais ce qui est sûr, c’est que William Onyeabor est l’un des premiers à se servir de synthétiseurs en Afrique à partir des années soixante-dix coiffé de son fidèle chapeau de cow-boy. Entre afro-beat, funk hypnotique et électro planante, impossible de classer le style musical du bidouilleur nigérian tant elle est personnelle. Les artistes du monde entier ne s’y sont pas trompés en découvrant les pépites musicales de ce “Fantastic Man” comme Better Change Your Mind, Atomic Bomb ou encore Body And Soul.
Backing band pour la plupart des artistes tropicalistes, le trio Os Mutantes publie son album éponyme quasiment en même temps que le manifeste tropicaliste Ou Panis et Circensis, en 1968. Créé par les deux frères Arnaldo Baptista et Sérgio Dias avec la guitariste chanteuse Rita Lee, la formation Os Mutantes conjugue de façon exubérante le psychédélisme, la pop orchestrale, la musique concrète et les musiques brésiliennes en y intégrant une multitude d’expérimentations avant-gardistes sous l’approbation tacite du gourou tropicaliste des studios Rogério Duprat. Apparition du Danube Bleu de Strauss à la fin de Panis et Circensis sous un déluge de fracas de verre, reprise de Baby chanté à l’origine par leur compatriote Gal Costa, utilisation de guitare fuzz sur A Minha Menina et Bat Macumba, cover de Françoise Hardy, Le premier bonheur du Jour, rires enregistrés au début de Ave Gengis Khan, tout est permis. Pas étonnant que le groupe, dissous en 1972, eut les faveurs de musiciens quelques années plus tard comme Kurt Cobain, Beck ou encore David Byrne.
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par Erwann Pacaud (auteur de l’indispensable ”Easy listening : Exotica & autres musiques légères”, sorti en 2016).
Bien tapis malgré eux à l’ombre des Beatles, Rolling Stones ou encore Elvis Presley, de nombreux musiciens et compositeurs n’ont pas eu la chance de percer comme ils auraient dû le faire. Coup du hasard ou poisse légendaire, leurs talents ont longtemps été dissimulés au grand public soit par paresse intellectuelle des grands médias spécialisés dans la musique ou simplement par mauvaise volonté de se mettre en avant eux-même. Voici quelques artistes qui méritent enfin d’être mis en lumière, le temps d’une lecture et d’une écoute attentive.
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